BIOGRAPHIE

Ayant débuté comme musicien dans les années cinquante, il se fait connaître comme chanteur au cours de la décennie suivante et devient une des vedettes les plus en vue des palmarès durant les années soixante-dix. C’est donc déjà un artiste d’expérience qui monte sur la scène du Coronet, à Québec, le 16 octobre 1967.

Jean Rusk grandit dans un milieu familial où l’on aime bien la musique. Son frère Bob est déjà impliqué dans le domaine de la musique de danse depuis plusieurs années quand Jean est invité à rejoindre le combo à titre de contrebassiste. Son arrivée coïncide avec la montée d’un nouveau style musical, le rock’n roll, alors que l’ensemble Bob Rusk demeure fort apprécié pour son exécution des rythmes latins toujours très en vogue. Au début des années soixante, quand la basse électrique vient remplacer l’encombrante contrebasse, le jeune musicien occupe de plus en plus officiellement la fonction de chanteur au sein du groupe. Quelques 45 tours sont alors lancés sous le nom de Jean Rusk dont une reprise du succès de Johnny Hallyday "L’idole des jeunes" et une composition originale "Quand le jour viendra" cosignée avec le guitariste Fernand Pelletier.

En 1964, comme beaucoup d’orchestres au Québec et partout ailleurs, l’ensemble de Bob Rusk et ses musiciens accuse le choc de la beatlemania. On peut voir la photo des musiciens, Jean en tête, peignés à la façon des Beatles dans un quotidien de la capitale québécoise, alors même que les quatre anglais dans le vent foulent le continent, début février. Dans l’année qui suit, de nombreux changements ont lieu tant au niveau du répertoire que du personnel. Jean délaisse définitivement la basse pour se consacrer entièrement au chant. À l’été 1965, les musiciens décident de faire leur marque parmi les nombreux groupes de la vague yé-yé et se renomment Les Doyens. Un 45 tours est lancé sur étiquette Fantastic mais ne connaît pas le succès escompté. Le groupe continue cependant d’être en forte demande dans le circuit des salles de danse jusqu’au jour où, sous la houlette de Tony Roman et Guy Cloutier, respectivement producteur et promoteur de la maison Canusa, le groupe se métamorphose à nouveau pour prendre le nom de La Bande à Zabé.

Pendant une partie de l’été 1967, les musiciens préparent un nouveau répertoire fortement orienté vers le style rhythm & blues tandis que se poursuivent les engagements des Doyens. Pour bien marquer la rupture de style, on se concentre exclusivement sur de nouvelles pièces pour monter le spectacle de Patrick Zabé. Le nouveau nom du chanteur est trouvé à partir de la fusion de deux noms existants, empruntés à l’entourage de l’équipe Canusa: Michel Zabé et Patrick Labouhda. L’ancien bassiste se donne une allure de scène qui attire l’attention, avec ses vêtements à la dernière mode des boutiques du Swinging London, ses joues garnies de longs favoris et surtout une voix profonde qu’il mesure aux standards du rhythm & blues. Un premier 45 tours paraît à l’automne, dans un style voisin de Nino Ferrer: "Un baiser, un baiser" est bientôt suivi d’un remarquable percée au palmarès avec "La lettre", version du succès "The Letter" des Box Tops. Si "La lettre" est une des plus jouées sur les ondes radio pendant l’hiver qui suit, c’est la chanson "Les lunettes" qui donne à Patrick Zabé son premier véritable succès de ventes. Elle marque aussi un tournant de la carrière du chanteur, désormais identifié à ses titres fantaisistes.

S’il reprend encore certains succès du hit parade anglophone, entre autres les pièces des Beatles ("Ob-la-di ob-la-da", "Oh Darling", "Bip Bop") et de Creedence Clearwater Revival ("Je roule ma bosse", "Quand j’écoute la radio", "N’as-tu jamais vu la pluie" cette dernière en duo avec Johnny Farago avec qui il fait équipe pendant plus de deux ans), c’est surtout dans le répertoire tropical qu’il puise ses succès les plus marquants, à partir de 1974. La chanson "Agadou dou dou" provient d’un séjour en Martinique où elle est l’hymne estival du Club Med. "Señor météo", une composition de Joe Dassin, et "Tout nu, tout bronzé" sont des facéties empruntées à l’exotique Carlos tandis que "Célimène" et "C’est bon pour le moral" proviennent en droite ligne de La Compagnie Créole.

Parallèlement à son côté fantaisiste, Patrick excelle dans la chanson pop ou plus douce. Il connaît un certain succès avec "L’été sur la plage", coécrite elle aussi avec Fernand Pelletier, tandis que des chansons comme "Un peu d’amour, beaucoup de haine" ou "On arrive" réussissent à percer le mur de la radio FM, passablement réfractaire à la chanson légère en ce début des années soixante-dix. Sentant la fragilité du statut de vedette pop, le chanteur s’intéresse très tôt au monde des affaires et du commerce, ouvrant tour à tour une boutique de fleuriste, puis une fabrique de chaussures - Zabé le Bottier - avant de se spécialiser dans la confection et la vente de jeans. Ce dernier commerce donne bientôt lieu à la chaîne bien connue des boutiques Zabé Jeans.

Sentant malgré tout l’appel de la scène et de la chanson, il revient épisodiquement en studio, le temps de graver quelques albums de créations originales mais peu connues en 1989 et 1992. La décennie 90 est pour lui une période de changements et de remises en question: il délaisse le secteur du vêtement et décide de se consacrer à une autre de ses passions, les antiquités. En 1996, il se départit de la chaîne de boutiques portant son nom et établit son nouveau commerce rue Saint-Paul, dans le Vieux-Port de Québec, en plein quartier des antiquaires. Après une absence totale de près de dix ans, Patrick Zabé effectue un retour sur scène avec le groupe Memories à l’été 1999, partageant souvent l'affiche avec d’autres chanteurs de sa génération, tels son frère Bob Rusk, Claude Atkins des Million-Airs, Ronald Grenier des Habits Jaunes ou le chanteur Marc Drolet. Suite à l'accueil positif que lui manifeste le public et au plaisir de renouer avec un métier qu'il affectionne toujours, il effectue un retour sur disque quelques années plus tard. C'est avec la collaboration de Marc Durand et de la maison de disques Konfit qu'il entreprend la préparation d'un nouvel album. "Mambo, Tango...et Providence" sort officiellement le 1er avril 2004 et confond les sceptiques.

Les nouvelles chansons, signées Patrice Frazer à l'exception d'un titre de Stéphane Venne, abordent des thèmes contemporains que l'on serait tenté de ranger sous la rubrique travers de la société, dans un registre différent mais avec la même verve que les succès de La Bolduc ou d'un Chuck Berry en leurs temps. "La rage au volant", "Le tango du viagra" ou "L'herbe de la Providence", une allusion à la mari thérapeutique, voisinent quelques refontes de titres du début de sa carrière comme "Quand le jour viendra", "Señor Météo", "Agadou dou dou" et la touchante "Un peu d'amour, beaucoup de haine" chantée à l'origine par Claude François. Les rythmes latins classiques y ont la part belle, bien que "Coup de foudre" tende vers l'énergie rock et que "L'herbe de la Providence" ait des affinités reggae bien compréhensibles.

Ce texte biographique est une gracieuseté de Québec Info Musique Découvrez des centaines d'artistes de chez nous sur